Terminale : cours et corrigés

Synthèse

Melchior cours SES lycée bac grand oral

(BO)

Déroulé du chapitre :

Question 1. L'intégration européenne

Question 2. La politique européenne de la concurrence

Question 3. L’action des politiques budgétaire et monétaire sur la conjoncture

Question 4. L’articulation des politiques budgétaire et monétaire dans le cadre européen

L’Union économique et monétaire (UEM) est une construction économique originale. L’adoption d’une monnaie unique implique que soit menée une politique monétaire unique pour tous les pays membres de l’UEM. Celle-ci relève de la compétence de la Banque centrale européenne (BCE). Cette dernière est indépendante du pouvoir politique, c’est à dire que ses décisions ne dépendent pas des préférences de tel ou tel gouvernement, de manière à ne pas privilégier un pays plutôt qu’un autre. En revanche, la politique budgétaire demeure du ressort de chaque pays membre. Cela se justifie tout d’abord pour des raisons politiques, les politiques budgétaires étant depuis toujours un élément central de la souveraineté nationale traduisant des choix de société singuliers en matière de redistribution ou d’allocation des ressources. La seconde justification est d’ordre économique. La politique monétaire unique condamne l’utilisation du taux de change par un pays membre pour gagner en compétitivité prix sur les autres pays membres (dévaluation compétitive) et réguler son activité économique. Il est alors cohérent que l’outil budgétaire lui soit laissé pour stabiliser sa propre conjoncture économique, d’autant plus lorsque celle-ci diffère de celles des autres pays membres de l’UEM. Ainsi, la politique monétaire est utilisée théoriquement pour stabiliser la situation moyenne de l’UEM en raison de son caractère unique et les politiques budgétaires nationales servent à stabiliser la situation particulière de chaque pays.

La politique budgétaire est cependant contrainte par les traités européens qui ont instauré certaines règles. Une règle budgétaire est une contrainte sur la politique budgétaire d’un gouvernement imposant des plafonds sur des agrégats de finances publiques ; la règle peut porter sur les dépenses, les recettes, le solde (déficit, excédent) et/ou la dette.

Les principales règles budgétaires européennes

Le cadre budgétaire actuel comprend quatre règles numériques :

  1. Le déficit public doit être inférieur à 3 % du PIB ;

  2. La dette publique brute doit être inférieure à 60 % du PIB. Si le ratio est plus élevé, il doit diminuer chaque année d’au moins 1/20e de l’écart entre le niveau d’endettement et la valeur de référence de 60 % ;

Source : d’après Z. Darvas, P. Martin et X. Ragot (2018), « Réformer les règles budgétaires européennes : simplification, stabilisation et soutenabilité », CAE

Ce partage des compétences en matière de politiques conjoncturelles n’est pas sans poser un certain nombre de problèmes liés au défaut de coordination et à la gestion de chocs asymétriques. La coordination est la procédure par laquelle les décisions des agents économiques sont rendues cohérentes entre elles. En effet, si l’ajustement repose sur la seule responsabilité d’un pays membre, les conséquences induites risquent d’impacter négativement les autres pays. Par exemple, un pays présentant des coûts de production plus élevés que ses partenaires commerciaux européens (pour un position de gamme comparable) engendrant un déficit commercial structurel, sera dans l’obligation de mener des politiques budgétaires restrictives pour limiter le déficit de la balance commerciale. Compte tenu des interdépendances (haut niveau de commerce intra-zone), une baisse de la demande globale dans ce pays affectera sa demande en produits importés et limitera les exportations des pays partenaires, donc leur demande globale et leur croissance économique. Au final, la zone entière connaîtra un niveau de croissance plus faible. La coordination des politiques budgétaires permettrait donc d’internaliser les externalités (c’est-à-dire les effets positifs de la relance d’un pays sur les autres pays de l’UEM) et d’atteindre une situation plus optimale.

Instaurer des règles peut être appréhendé comme une manière de coordonner les politiques budgétaires a minima, en précisant ce qu’il leur est possible de ne pas faire mais sans inciter à réaliser ce qu’il serait efficace de faire sur le plan économique. La capacité des politiques budgétaires à stabiliser la conjoncture économique s’en trouve alors réduite. Les règles européennes, associées à la libéralisation des économies européennes, ont limité l’ampleur des stabilisateurs automatiques. En période de croissance économique faible, les ménages modestes bénéficiant de prestations sociales ont reçu une aide plus limitée. Les entreprises et les ménages aisés ont dans le même temps payé moins d’impôts. L’effet net est négatif en raison d’une baisse de la demande des premiers (dont la propension à consommer est forte) supérieure à la hausse pour les seconds (propension à consommer plus faible pour les ménages aisés et à investir plus faible pour les entreprises en période de faible activité). De plus, en période de croissance plus soutenue, les entrées fiscales n’augmentent pas notablement car les entreprises profitables et les ménages aisés ne paient pas plus d’impôts, continuant à bénéficier d’exonérations. L’Etat n’est pas alors en mesure de réduire les niveaux de déficit et de dette afin de reconstituer des marges de manœuvre en prévision d’un retournement de conjoncture futur. Les règles budgétaires ne permettent donc pas aux stabilisateurs automatiques de creuser suffisamment les déficits en période de récession et de réaliser des excédents conséquents en période d’expansion.

La partage des compétences en matière de politiques conjoncturelles tel qu’il existe aujourd’hui rend aussi difficile la gestion de chocs asymétriques en l’absence de coordination. Ceux-ci désignent un évènement ayant un impact macroéconomique seulement sur un pays ou avec une intensité différente selon les pays. Ils peuvent prendre la forme par exemple d’une variation de la demande dans un secteur dans lequel un pays est spécialisé ou d’un évènement politique (arrivée au pouvoir d’un parti qui génère de l’inquiétude sur les marchés financiers par exemple) ou social (arrivée massive de travailleurs immigrés). Lorsqu’une économie est victime par exemple d’un choc de demande négatif asymétrique, sa conjoncture se dégrade (la croissance de son PIB réel ralentit et le chômage augmente). Elle a donc besoin d’une politique conjoncturelle appropriée pour stabiliser son activité : dans ce cas précis, une politique monétaire et / ou budgétaire de relance. Comme la politique monétaire est unique, elle ne peut s’adapter à la conjoncture d’un seul Etat membre alors que celle des autres est différente. La politique budgétaire du pays concerné par le choc négatif devrait alors être mobilisée librement pour le compenser. Le problème qui se pose alors est que les autorités européennes ont fait un choix différent en instaurant des règles qui limitent de fait les politiques budgétaires discrétionnaires et les stabilisateurs automatiques et tend à les harmoniser. Les règles limitant le recours au déficit public entrent en contradiction avec le besoin accru de stabilisation au niveau national dans une UEM. De plus, un pays victime d’un choc négatif hésitera à mener une politique de relance budgétaire en raison de la présence d’externalités budgétaires. En effet, il est en mesure de redouter que les effets positifs du creusement du déficit public bénéficient à ses partenaires de l’UEM (en augmentant leurs exportations vers ce pays et donc leur demande globale), lesquels pourront profiter de la situation en l’absence de coordination budgétaire pour mener des politiques restrictives afin d’équilibrer leurs comptes publics. Cela limiterait leurs importations en provenance du pays ayant opéré la relance et donc opérerait une pression à la baisse sur sa demande globale, limitant ainsi l’effet de la relance budgétaire initiale.

Ainsi, si la politique monétaire est commune et le recours aux politiques budgétaires de relance limité, les conséquences négatives d’un choc asymétrique ne pourront être compensées.

Des politiques de relance ont été largement appliquées au niveau européen face aux conséquences de la Covid-19 en 2020 (voir le Dossier spécial Covid-19). Tout d’abord, la BCE s’est montrée prompte dès le mois de mars à pratiquer des politiques monétaires accommodantes (voir le décryptage « L’action des banques centrales dans la crise du coronavirus »). Très vite, à la même période, la Commission européenne a suspendu l’application des règles budgétaires de manière à ne pas entraver le soutien à l’économie, témoignant des limites de celles-ci (voir l’analyse de Patrick Artus « Comment faudrait-il modifier les règles budgétaires de la zone euro ? »). Une relance budgétaire commune a été plus longue cependant à être mise en œuvre. Le 22 juillet, un plan de relance commun a été adopté. Celui-ci s’élève à 750 milliards de dollars sur plusieurs années dont 390 milliards de subventions aux Etats (non remboursables) et 360 milliards de prêts (remboursables). La grande nouveauté se situe dans les modalités de financement de ce plan. Les pays membres ont en effet opté pour un fédéralisme accru en choisissant de mutualiser la dette publique émise pour financer ces mesures de relance.

Synthèse

Melchior cours SES lycée bac grand oral

(BO)

Déroulé du chapitre :

Question 1. Les inégalités économiques et sociales et leur évolution

Question 2. Les principaux outils de mesure des inégalités

Question 3. Les différentes conceptions de la justice sociale

Question 4. L’action des pouvoirs publics en matière de justice sociale

La mise en place de politiques en faveur d’une plus grande justice sociale suppose, au préalable, de définir clairement ce qui est accepté par tous comme une répartition « juste » des richesses dans la société. Le principe d’égalité est au fondement de toutes les conceptions de la justice sociale ; mais ce principe recouvre plusieurs dimensions parfois contradictoires. La question est donc de savoir quelles inégalités sont acceptées et jugées acceptables par les différentes conceptions de la justice sociale.

1. Les différentes formes d’égalité et les principes qui les fondent

L’égalité désigne l’équivalence, ou du moins la similitude, des ressources possédées, des statuts occupés, ou des conditions possibles, entre individus ou groupes sociaux. Cette définition, très large, englobe plusieurs dimensions possibles du concept d’égalité, en fonction des objectifs recherchés.

1.1. Le principe d’égalité, au fondement des sociétés démocratiques : égalité des droits, égalité des chances et égalité des positions

L’égalité des droits est l’un des fondements des régimes politiques démocratiques. L’égalité des droits n’est jamais entièrement acquise et il s’agit d’un principe de justice qui guide, encore aujourd’hui, les choix opérés en matière de politiques sociales. (document 1).

Pour Alexis de Tocqueville (1805-1859), les sociétés démocratiques se caractérisent par l’existence d’une égalité des positions. Contrairement à ce qui prévaut dans les sociétés aristocratiques de l’Ancien régime, dans les sociétés démocratiques, les valets peuvent devenir maîtres, et les maîtres peuvent devenir valets. L’égalité des positions n’est possible que si les individus ont les mêmes possibilités que quiconque d’accéder à n’importe quelle position sociale : Alexis de Tocqueville théorise ainsi ce que l’on appelle l’égalité des chances (document 2).

1.2. Le principe d’égalité dans les sociétés contemporaines : entre égalité des chances et égalité des situations 
 

L’égalité des situations et l’égalité des chances sont deux modèles d’égalité distincts qui portent deux conceptions opposées de la justice sociale. L’égalité des situations a pour objectif le rapprochement des conditions économiques et sociales entre individus. Les politiques de justice sociale peuvent aussi s’attacher à « donner à tous les individus les mêmes chances de s’élever dans la société et de réaliser leurs ambitions et leurs projets » : il s’agit d’un objectif d’égalité des chances. Les politiques se concentrent alors sur la lutte contre les discriminations, car ces dernières empêchent les individus issus des minorités d’être récompensés pour les efforts individuels fournis. (document 3). Si l’on s’intéresse à la manière dont les individus définissent aujourd’hui le juste ou l’injuste, il ressort des enquêtes que les Français adhèrent à des critères de justice multiples, hiérarchisés selon l’ordre suivant : la satisfaction des besoins de base pour tous, la reconnaissance du mérite de chacun, et la réduction des inégalités économiques. L’égalité des chances est considérée comme prioritaire sur l’égalité des situations ; les individus considèrent que chacun doit être rémunéré selon son mérite. Pour cela, il convient de corriger les inégalités que subissent des personnes ou des groupes défavorisés : il s’agit du principe d’équité. (document 4).

2. Qu’est-ce qui est considéré comme juste par les différentes conceptions de la justice sociale ?

La justice sociale est une construction morale et politique, ce qui signifie que les membres d’une société s’accordent sur certains principes de justice, acceptés par tous et qui orientent l’action politique. Il existe plusieurs conceptions de la justice sociale, qui diffèrent notamment selon le degré d’inégalités qu’elles jugent acceptables :

2.1. L’utilitarisme et le libertarisme considèrent que les inégalités de situations sont acceptables

L’utilitarisme est une conception de la justice sociale issue d’une doctrine philosophique, fondée par Jeremy Bentham (1748-1832) et qui s’est développée à la fin du XVIIIème siècle. Cette doctrine propose un modèle de justice sociale où le choix le plus juste est celui qui maximise la somme des bonheurs individuels de la société. Or, pour un même niveau de bien-être, plusieurs distributions sont possibles : dans l’absolu, le bien-être collectif peut atteindre son niveau maximal, tout en ne procurant du bien-être qu’à un seul individu. Les inégalités économiques et sociales sont donc acceptées par les utilitaristes (document 5). Pour de toutes autres raisons, le courant du libertarisme justifie également l’existence d’inégalités de situations entre les individus. Selon Robert Nozick, il est impossible de demander à un individu de supporter un quelconque coût au prétexte d’apporter un bénéfice à d’autres individus, car cela constitue une atteinte à ses libertés individuelles et au droit de propriété privée (document 6). Le libertarisme considère également que l’égalité des chances constitue une atteinte à l’égalité devant la loi.

2.2. L’égalitarisme libéral tente de concilier égalité des chances et égalité des situations

L’égalitarisme libéral est une doctrine développée par John Rawls (1921-2002), dans l’ouvrage Théorie de la justice sociale (1971), afin d’essayer deux concilier deux des principes des sociétés démocratiques souvent considérés comme incompatibles : la liberté et l’égalité. La conception de l’égalitarisme libéral repose sur deux principes fondamentaux : le « principe de liberté », selon lequel les libertés individuelles de tous les individus doivent être garanties ; le « principe de différence », selon lequel certaines inégalités socio-économiques peuvent être tolérées dans une société juste, à condition que ces inégalités puissent permettre d’améliorer le sort des plus démunis, et à condition que l’égalité des chances soit respectée. (document 7).

2.3. L’égalitarisme strict considère que les inégalités sont fondamentalement injustes

Cette conception de la justice sociale implique une égalité des résultats et des traitements entre les individus. L’égalitarisme prône le rapprochement des situations socio-économiques des individus dans la société ; en ce sens, il s’agit d’une conception de la justice sociale qui met l’accent sur l’égalité des situations pour guider les décisions politiques. L’égalitarisme strict considère que l’égalité des droits n’est que formelle et que, appliquée à un système inégalitaire, elle permet de légitimer et reproduire les inégalités déjà en place (document 8). Il faut donc chercher à atteindre une égalité des situations, seule forme d’égalité qui permet réellement l’existence d’une société juste. L’égalité des situations permet en effet d’améliorer la cohésion sociale et la solidarité. Elle permet également de renforcer l’égalité des chances, en resserrant la hiérarchie des positions sociales (document 9).

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