Document 7 : Egalité des positions et égalité des chances

Facile

« Il existe deux grandes manières de considérer les inégalités sociales. La première, plutôt européenne, liée au mouvement ouvrier et à la tradition de la gauche, pense qu’il importe d’abord de réduire les inégalités entre les positions sociales, de resserrer l’écart entre les plus riches et les plus pauvres. Dans ce cadre, on considère que les inégalités sociales sont principalement des inégalités de classes opposant les exploiteurs aux exploités. La justice sociale consiste à offrir des protections sociales contre les aléas de la vie et de l’économie, elle conduit à développer l’État providence et les services publics grâce à l’impôt progressif et à la redistribution. C’est ce que l’on a longtemps appelé le progrès social.

 

Aujourd’hui, cette conception de l’égalité des places est mise à mal par la mondialisation qui met les Etats providence nationaux en concurrence. Elle est aussi affaiblie par le recul de la croissance et par l’affaiblissement de l’idée de solidarité quand les sociétés nationales deviennent plurielles et pluriculturelles. Par ailleurs cette conception de la justice a longtemps été aveugle aux inégalités imposées aux femmes et aux minorités car elle était construite sur la figure de l’homme travailleur et blanc sur laquelle étaient construits les droits sociaux. Mais tout au long du XXe siècle, l’égalité des places a très sensiblement réduit les inégalités sociales, même si l’État providence a surtout bénéficié aux classes moyennes.

 

La seconde conception de la justice sociale, plutôt américaine, considère que la justice sociale est avant tout la promotion de l’égalité des chances méritocratique : chacun doit pouvoir réussir en fonction de son mérite. Dans ce cadre, les inégalités sont moins définies en termes de revenus et d’exploitation qu’en termes de discriminations et de traitement inéquitable des minorités privées de leurs chances de réussir. Ce modèle s’impose quand le premier faiblit, quand la société est plus individualiste et quand chacun a le droit égalitaire de vouloir réussir et d’échapper ainsi à sa condition sociale. Aujourd’hui, l’égalité des chances tend à s’imposer et les discriminations sont devenues la figure cardinale des injustices. Cependant il faut noter que, même si l’égalité de chances n’est pas contestable en termes de principes de justice, ce modèle de l’équité peut accroître les inégalités de positions dès lors que les vainqueurs et les vaincus de la méritocratie mériteraient leur sort. De plus ce modèle interroge la solidarité puisque la société n’est plus perçue comme un système fonctionnel, mais comme une compétition continue pour obtenir le succès, même quand cette compétition est équitable. »

 

Source : « Les inégalités sociales en France. Entretiens », Louis Maurin, François Dubet, Laurent Mucchielli, Pierre Bruno, Dans Le français aujourd'hui 2013/4 (n°183), pages 29 à 40

Questions : 

1) Retrouvez les définitions des notions d’égalité des chances et d’égalité des position, avant de précisez les politiques sociales qui leur sont associées.

2) Quels sont leurs avantages et inconvénients respectifs ?

Voir la correction

1) L’égalité des positions désigne le resserrement des écarts entre les plus riches et les plus pauvres. Elle renvoie à des mesures visant à réduire les différences de revenus ou de patrimoine (redistribution verticale), aux services publics fournis par l’Etat ou encore à la protection sociale (redistribution horizontale). L’égalité des chances désigne la promotion du fait que chacun puisse réussir selon son mérite. Elle renvoie à des mesures de lutte contre les discriminations visant à réduire le poids de critères illégitimes tels que le sexe, l’origine social, l’origine géographique, etc. sur les parcours individuels.

2)

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