La dynamique de la construction européenne - Grands auteurs

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Patrick Artus : économiste français, directeur des études et de la recherche de Natixis, Patrick Artus est spécialiste des questions relatives à l’Union européenne et à sa gouvernance. Si Patrick Artus met en avant les avantages de l’intégration européenne, il insiste cependant sur les fragilités structurelles de cette construction. L’adoption de la monnaie unique créée des divergences en termes de discipline budgétaire au sein de l’UE. Les pays européens qui ne sont pas dans la zone euro ont ainsi un niveau de contrainte budgétaire plus faible que ceux qui adhérent à l’UEM. De même, les dynamiques de libéralisation et de concurrence fragilisent la construction européenne qui gagnerait, toujours selon Patrick Artus, à adopter davantage de solidarité budgétaire. Il faudrait tendre vers la construction d’un grand budget européen, avec une possibilité de transferts entre les différents pays selon les besoins. Patrick Artus appelle ainsi à une réforme des institutions et de la gouvernance européenne vers davantage de fédéralisme. La mise en place d’un grand budget européen ou encore d’un ministre européen de l’Economie pourraient permettre de desserrer la contrainte budgétaire et de favoriser les transferts entre les Etats membres.

Béla Balassa : économiste hongrois (1928-1991), Béla Balassa est particulièrement connu pour avoir développé sa théorie de l’intégration économique. Dans son ouvrage intitulé Théorie de l’intégration économique (1961), il met en évidence les cinq étapes du processus d’intégration économique. La première étape réside dans la constitution d’une zone de libre échange qui se caractérise par une suppression ou une diminution des barrières douanières à l’intérieur de la zone. Les pays franchissent l’étape de l’union douanière lorsque s’ajoute à la zone de libre-échange une politique commerciale commune vis-à-vis du reste du monde. Le marché commun vient ensuite ajouter à l’union douanière une libre circulation des marchandises et des facteurs de production (capital, travail, brevets etc.). L’union économique peut se définir par l’adoption de politiques économiques communes. Cela inclut une politique monétaire commune. Enfin, la fédération d’Etats constitue le degré ultime d’intégration économique que Béla Balassa appelle « l’intégration totale » : à l’union économique et monétaire s’ajoute la constitution d’un pouvoir politique fédéral avec l’harmonisation de politiques fiscales et sociales. L’Union économique et monétaire est une étape un peu plus poussée que la simple union économique puisqu’il s’agit pour les pays de la zone euro de partager une monnaie unique et une politique monétaire commune. L’UEM n’est cependant pas une fédération d’Etats et ne franchit pas la dernière étape du processus d’intégration économique.

A. Bénassy-Queré : est une économiste française spécialiste de macroéconomie, Chef économiste à la Direction Générale du Trésor depuis juin 2020. Dans un article intitulé « Les obstacles à la croissance européenne », Cahier du Cercle des économistes (2006) elle montre que la réalisation de la stratégie de croissance de l’UE est aujourd’hui compromise par les lacunes de la gouvernance européenne. Elle met en évidence un triangle d’incompatibilité entre la stratégie de Lisbonne, le Pacte de stabilité et de croissance (1997) et l’existence d’une concurrence fiscale entre les pays européens. En effet, le PCS oblige les Etats à respecter un niveau de déficit public contraignant sans prendre en compte les investissements favorables à la croissance. La concurrence fiscale favorise la mobilité des travailleurs qualifiés au détriment des entreprises innovantes. La stratégie de croissance devient alors le « côté faible » du triangle. Dans son ouvrage Economie de l’euro (2002),  elle défend les avantages de la monnaie unique mais appelle néanmoins à une réforme de la gouvernance de l’UEM.

Robert Mundell : Robert Mundell (1932-2021) est un économiste canadien qui a reçu le prix Nobel d'économie pour ses travaux sur les zones monétaires optimales (ZMO) qui ont servi de justifications théoriques à la création de l'euro. Il s’interroge sur les conditions dans lesquelles un pays devrait renoncer à renoncer à sa souveraineté monétaire pour entrer dans une union monétaire. En 1961 (« A Theory of Optimum Currency Areas », American Economic Review, vol. 51), il met en évidence le critère de la mobilité géographique des facteurs de production qui jouent le rôle de stabilisateurs automatiques au sein de la zone en cas de chocs asymétriques : si les facteurs de production (capital et travail) sont parfaitement mobiles, le différentiel de conjoncture se résorbe par la mobilité des facteurs. Outre ses travaux sur les ZMO qui ont donné suite à de nombreux prolongements théoriques et à une littérature abondante sur la question, Robert Mundell a mis en évidence l’existence d’un « triangle des incompatibilités » popularisé ensuite par T. Padoa-Schioppa : il n’est pas possible de concilier à la fois des taux de changes fixes, une mobilité des capitaux et une autonomie des politiques monétaires nationales. Seuls deux objectifs sont soutenables à la fois. Dans cette perspective, la monnaie unique apparait alors comme une solution à cette incompatibilité en transférant la souveraineté monétaire nationale à une institution régionale, à savoir la BCE.

Jacob Viner : économiste canadien (1892-1970), Jacob Viner propose en 1950 une théorie des unions douanières dans un ouvrage intitulé The Custom Union Issues. L’union douanière vise à supprimer les barrières tarifaires et non tarifaires entre les pays membres, créant ainsi deux effets bénéfiques pour les pays concernés. D’abord, l’union douanière engendre un effet de création de commerce. La concurrence entre les différents producteurs de l’union se traduit par une plus grande efficacité économique, favorable aux consommateurs. Ensuite, l’union douanière est responsable de détournements de commerce ou de trafic : après la formation d’une union douanière entre les pays A et B, l’un des partenaires cessera d’acheter à un pays tiers pour privilégier le partenaire de l’union douanière. La constitution d’une union douanière s’avère donc bénéfique pour les pays membres.

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