Question 1. L'intégration européenne

Sommaire

L’intégration économique est le processus par lequel plusieurs économies distinctes sont conduites à ne former qu’un seul espace économique. Dans le cadre européen, l’intégration passe par la constitution d’un marché unique et par l’adoption d’une monnaie unique, l’euro.

La constitution du Marché unique européen s’inscrit dans un processus débuté après la seconde guerre mondiale. Dès le début, la construction européenne prend pour institution fondatrice le marché. L’idée est que la constitution d’un grand marché au niveau européen favoriserait les échanges entre pays concernés, leur prospérité et par conséquent garantirait la paix entre les peuples. Le traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA), signé en 1951 par les six membres fondateurs (Bénélux, Allemagne de l’ouest, Italie et France), est la première étape de l’intégration économique. Les mêmes pays signent en 1957 le Traité de Rome instituant la Communauté économique européenne dont l’objectif est d’éliminer les « barrières qui divisent l’Europe ». On y trouve distinctement deux projets d’unification. Le premier passe par la constitution d’une Union douanière (Accord commercial régional dans lequel les pays membres ont aboli les barrières douanières et pratiquent un tarif extérieur commun) et le second par la réalisation à l’échelle européenne d’un Marché unique grâce à la mise en œuvre des « quatre libertés », de circulation des biens, des services, des personnes et des capitaux. L’Union douanière est effective à partir de 1970. Quant au Marché unique, il faut attendre 1986 pour que soit signé par douze pays l’Acte unique européen fixant à fin 1992 la réalisation effective du marché intérieur. La logique de marché commun, illustrée par l’abolition des droits de douane entre pays membres, laisse la place à une logique de Marché unique avec l’instauration des quatre libertés.

Aujourd’hui, de nombreux observateurs considèrent que le Marché unique est réalisé en grande partie, mais n’est pourtant pas totalement achevé. Le marché du capital est certainement le plus abouti : les mouvements de capitaux ont été complètement libéralisés et la monnaie unique a favorisé les transferts de capitaux entre pays. Le marché des biens européen regroupe plus de 500 millions de consommateurs en 2020. Les pays membres de l’Union européenne (UE), qui a remplacé la Communauté européenne en 1992, commercent au deux tiers avec d’autres pays membres lorsqu’ils échangent à l’international. De plus, le commerce de biens des 28 pays européens (avant la sortie de la Grande Bretagne en janvier 2020) représente environ un tiers du commerce international à la fin des années 2010. Pour ces raisons, il est possible d’affirmer que le marché des biens est comme celui des capitaux fortement intégré aujourd’hui. Cela n’est pas le cas du marché des services européens. Ces derniers représentent près de 70 % du PIB de l’UE mais moins de 20 % des échanges. Il existe pourtant depuis 2006 une clause de libre circulation des services dont sont exclus cependant les services publics et sociaux. Enfin, il semble difficile de parler d’un marché du travail européen intégré. Le libre circulation des personnes a pourtant été facilitée par les accords de Schengen de 1985 qui suppriment les contrôles à la plupart des frontières intérieures. Depuis les années 1980, seulement 2 % des travailleurs sont mobiles dans l’UE. Au final, on peut affirmer que si le marché du capital et celui des biens sont très intégrés, cela est beaucoup moins le cas pour le marché des services et celui de la main d’œuvre.

L’intégration européenne passe aussi par la constitution de la zone euro. En 2019, l’euro a fêté ses vingt ans. Avec les institutions qui accompagnent la monnaie unique de 19 pays, la construction monétaire européenne constitue une expérience originale et approfondie d’intégration économique.

Les pays membres de l’Union européenne et de la zone euro

Source : touteleurope.eu (janvier 2020)

L’adoption de la monnaie unique est cependant le résultat d’un long processus. Jacques Rueff déclarait déjà en 1949 que « l’Europe se fera par la monnaie ou ne se fera pas ». Le Traité de Maastricht, signé en 1992, fixe les critères de convergence réglant l’entrée d’un Etat membre dans la future Union économique et monétaire (UEM).

Le 1er janvier 1999, les monnaies des 11 pays qui remplissent les critères disparaissent pour devenir des subdivisions de l’euro et leur politique monétaire est confiée à la Banque centrale européenne. Les pièces et billets en euros sont utilisés pour la première fois le 1er janvier 2002.

L’adoption de la monnaie unique se justifie selon deux types d’avantages. Ceux-ci sont tout d’abord d’ordre microéconomique : la suppression des coûts de transaction de change et de l’incertitude liée au risque de change permet de réaliser des économies (plus de coût pour changer une monnaie dans une autre) encourage les échanges de produits, facilite les investissements dans les autres pays membres et améliore la transparence des prix (ce qui favorise la concurrence). Les avantages sont aussi d’ordre macroéconomique puisque la politique monétaire unique pour la zone évite les politiques déloyales comme celles consistant à exporter son chômage en dévaluant sa monnaie. L’inconvénient essentiel réside dans la perte pour les pays concernés du pilotage d’un instrument central de politique économique, la monnaie, permettant de faire face à des chocs de demande ou d’offre.

La mise en œuvre du Marché unique a eu des effets indéniables sur la croissance économique. Selon les travaux portant sur la question, les effets positifs sont passés essentiellement par le canal du commerce international. Les économistes retiennent aujourd’hui le mécanisme simplifié suivant pour expliquer les effets du développement du commerce sur la croissance économique. L’accroissement du commerce entre pays membres de l’UE permis par le Marché unique favorise la hausse du produit intérieur brut (PIB) grâce à des gains d’efficacité induits par la diminution des barrières au commerce, par la hausse de la taille de la production (économies d’échelle) et par la hausse de la concurrence. D’autres effets dynamiques peuvent aussi s’ajouter pour expliquer la hausse du PIB : le développement des échanges de produits et de capitaux (via les investissements directs étrangers) multiplie les incitations à innover et favorise l’importation des technologies, ce qui accélère la productivité du travail et accélère la croissance économique. Ces effets joueraient donc à plein pour les pays membres de l’UE. L’achèvement de l’union douanière en 1968 (abolition des droits de douane entre pays membres et tarif extérieur commun) à laquelle s’ajoute la fin des restrictions quantitatives constitue une étape importante mais pas autant que l’entrée en vigueur du marché unique en 1993.

Document 1 : Le marché unique.

Difficile

Le marché intérieur de l'Union européenne, aussi appelé marché unique, est une union douanière* entre tous les Etats membres de l'UE, qui repose sur quatre libertés fondamentales : la libre circulation des biens et des services, des capitaux et des personnes. C'est le plus grand espace économique sans barrière du monde, d'autant plus qu'actuellement, au-delà des États membres de l'UE, l'Islande, le Liechtenstein, la Norvège et la Suisse y participent par le biais d'accords multilatéraux ou bilatéraux. Le Royaume-Uni continue d'y participer pendant la durée de la période de transition qui suit sa sortie de l'Union européenne.

Ce marché unique (anciennement appelé "marché commun") se fonde sur un principe d'efficacité économique, selon lequel la suppression des obstacles à la libre circulation sur le continent permet un développement économique de tous les pays : plus de concurrence, plus d'innovation, et des produits plus nombreux et moins chers.

Au sein du marché unique, les droits de douane et les quotas ont donc été abandonnés entre les États membres. Afin d'assurer la mise en œuvre effective des quatre libertés, le marché unique requiert également des règles de concurrence commune à tous ses membres, une certaine harmonisation fiscale et un rapprochement des législations nationales notamment dans les domaines de la santé et de l'environnement. Ce que les institutions européennes entreprennent depuis plusieurs décennies.

Aujourd’hui, le marché unique permet aux producteurs et aux travailleurs de s’adresser à près de 530 millions de consommateurs. Selon le Parlement européen en 2018, on estime ainsi "à 2,8 millions le nombre d'emplois créés par le marché unique". Il aurait également permis de doubler le commerce de biens entre les pays membres et "d'atteindre un niveau de PIB réel de 4,4 % plus élevé", selon les estimations d'économistes du CEPII la même année.

Source : touteleurope.eu

*Accord commercial régional dans lequel les pays membres ont aboli les barrières douanières et pratiquent un tarif extérieur commun.

 

Questions :

1. Quelles sont les caractéristiques du marché unique ?

2. Expliquez le principe qui fonde le choix de créer le marché unique.

Document 2 : Le marché unique est fondé sur quatre libertés.

Facile

Objectif du traité de Rome de 1957, le marché commun est l'une des premières concrétisations de la Communauté économique européenne. L'union douanière entre en effet en vigueur en 1968 entre les six pays fondateurs. Conformément aux préceptes libéraux, la suppression des obstacles à la libre circulation des marchandises est vue comme une condition du développement économique des pays.

Dans les années 1990, ce marché prend le nom de "marché unique" ou "marché intérieur". Il repose alors sur quatre libertés : libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux. Mais également sur une certaine harmonisation fiscale et un rapprochement des législations nationales.

La libre circulation des marchandises se fonde sur la suppression des droits de douane et des taxes sur le marché européen. Autrement dit, les Etats membres peuvent échanger des marchandises entre eux sans surcoût, et qui plus est sans limite de quantité. Divers contrôles ont néanmoins lieu à l'intérieur et à l'extérieur des frontières de l'UE.

A l'origine centrée sur les travailleurs – salariés et indépendants – la libre circulation des personnes a été généralisée en 1990 à l'ensemble des ressortissants de l'UE. Elle autorise les citoyens européens et les membres de leur famille à se déplacer dans un autre pays de l'Union européenne pour voyager, étudier, travailler et résider. Par ailleurs, l'espace Schengen abolit en 1995 le contrôle aux frontières de ses pays membres, aujourd'hui au nombre de 26.

La libre circulation des services permet aux prestataires de pouvoir exercer leurs activités de service dans n'importe quel Etat membre de l'UE, et ce sans subir de discriminations.

Enfin, la libre circulation des capitaux est la plus récente des grandes libertés assurées par l'Union européenne. C'est également la plus large, car elle concerne aussi les pays tiers, interdisant toute restriction aux mouvements des capitaux à la fois entre les Etats membres, et entre les Etats membres et les pays tiers.

Source : touteleurope.eu

 

Question :

Caractérisez les modalités permettant d’établir les 4 libertés en remplissant le tableau ci-dessous.

Document 3 : Qu’est-ce que la zone euro ?

Facile

Tous les États membres de l’Union européenne font partie de l’Union économique et monétaire (UEM) et coordonnent l’élaboration de leur politique économique pour soutenir les objectifs économiques de l’UE. Toutefois, un certain nombre d’entre eux ont franchi une étape supplémentaire en remplaçant leur monnaie nationale par la monnaie unique, l’euro. Ces États membres constituent la zone euro.

En 1999, lorsque l’euro a été introduit pour la première fois […], la zone euro était constituée de 11 des 15 pays faisant alors partie de l’UE. La Grèce les a rejoints en 2001, un an avant le passage à la monnaie fiduciaire. Elle a été suivie par la Slovénie en 2007, Chypre et Malte en 2008, la Slovaquie en 2009, l’Estonie en 2011, la Lettonie en 2014 et la Lituanie en 2015. Aujourd’hui, la zone euro regroupe 19 États membres de l’UE.

Parmi les États membres n’en faisant pas partie, le Danemark et le Royaume-Uni ont négocié une «clause de non-participation», qui figure dans les protocoles annexés au traité, mais ils pourront y adhérer ultérieurement s’ils le souhaitent. La Suède ne remplit pas encore les conditions requises pour faire partie de la zone euro.

Les autres États membres n’appartenant pas à la zone euro comptent parmi les pays ayant adhéré à l’Union en 2004, 2007 et 2013, après l’introduction de l’euro. Au moment de leur adhésion, ils ne remplissaient pas les conditions requises pour faire partie de la zone euro, mais ils se sont engagés à y adhérer lorsque ces conditions seront réunies. Il s’agit des États membres «faisant l’objet d’une dérogation», comme la Suède.

Andorre, Monaco, Saint-Marin et la Cité du Vatican ont fait de l’euro leur monnaie nationale, en vertu d’accords monétaires spécifiques avec l’UE, et peuvent émettre leurs propres pièces en euros, dans certaines limites. Toutefois, comme ils ne sont pas membres de l’UE, ils ne font pas partie de la zone euro.

Source : ec.europa.eu

 

Questions :

1. Qu’est-ce que la zone euro ?

2. Tous les pays de l’Union européenne sont-ils dans la zone euro ?

3. Tous les pays utilisant l’euro comme monnaie nationale font-ils partie de l’UE ?

Document 4 : Les effets du marché unique sur la croissance économique.

Facile

Tous les États membres de l’Union européenne font partie de l’Union économique et monétaire (UEM) et coordonnent l’élaboration de leur politique économique pour soutenir les objectifs économiques de l’UE. Toutefois, un certain nombre d’entre eux ont franchi une étape supplémentaire en remplaçant leur monnaie nationale par la monnaie unique, l’euro. Ces États membres constituent la zone euro.

En 1999, lorsque l’euro a été introduit pour la première fois […], la zone euro était constituée de 11 des 15 pays faisant alors partie de l’UE. La Grèce les a rejoints en 2001, un an avant le passage à la monnaie fiduciaire. Elle a été suivie par la Slovénie en 2007, Chypre et Malte en 2008, la Slovaquie en 2009, l’Estonie en 2011, la Lettonie en 2014 et la Lituanie en 2015. Aujourd’hui, la zone euro regroupe 19 États membres de l’UE.

Parmi les États membres n’en faisant pas partie, le Danemark et le Royaume-Uni ont négocié une «clause de non-participation», qui figure dans les protocoles annexés au traité, mais ils pourront y adhérer ultérieurement s’ils le souhaitent. La Suède ne remplit pas encore les conditions requises pour faire partie de la zone euro.

Les autres États membres n’appartenant pas à la zone euro comptent parmi les pays ayant adhéré à l’Union en 2004, 2007 et 2013, après l’introduction de l’euro. Au moment de leur adhésion, ils ne remplissaient pas les conditions requises pour faire partie de la zone euro, mais ils se sont engagés à y adhérer lorsque ces conditions seront réunies. Il s’agit des États membres «faisant l’objet d’une dérogation», comme la Suède.

Andorre, Monaco, Saint-Marin et la Cité du Vatican ont fait de l’euro leur monnaie nationale, en vertu d’accords monétaires spécifiques avec l’UE, et peuvent émettre leurs propres pièces en euros, dans certaines limites. Toutefois, comme ils ne sont pas membres de l’UE, ils ne font pas partie de la zone euro.

Source : ec.europa.eu

 

Questions :

1. Qu’est-ce que la zone euro ?

2. Tous les pays de l’Union européenne sont-ils dans la zone euro ?

3. Tous les pays utilisant l’euro comme monnaie nationale font-ils partie de l’UE ?

 

 

Document 4 : Les effets du marché unique sur la croissance économique.

Nous soulignons deux dates importantes (indiquées par des traits verticaux) : i) 1968, qui marque la fin de la période d'introduction progressive de la Communauté Économique Européenne (après cela, les droits de douane sont supprimés définitivement entre les membres, les restrictions quantitatives sont abolies et des droits de douane extérieurs communs vis-à-vis des pays tiers sont mis en œuvre), et ii) 1993, date d'entrée en vigueur du marché unique. La tendance générale est assez claire : l'impact de l'UE est important et s'amplifie avec le temps. C’est à partir des années 1990, avec la mise en place progressive du marché unique, que l’intégration européenne atteint un niveau sans précédent, allant bien au-delà des réductions tarifaires : l'impact commercial du marché unique est trois fois plus important que l'effet d'un accord régional standard, ou « normal ». Nous estimons en effet que le marché unique a augmenté les échanges entre les membres de l'UE de 109 % en moyenne pour les biens et de 58 % pour les services. […] Étant donné que le niveau de droit de douane moyen imposé par l’UE à ses partenaires extérieurs est de 4,7 %, l’ampleur de la différence montre clairement que l’appartenance au marché unique est un facteur d’ouverture qui dépasse largement une simple baisse de droits de douane.

Pourquoi l'impact estimé de l'UE est-il aussi important, comparé à un accord commercial classique ? Tout d'abord parce que les dispositions concernant les obstacles au commerce de marchandises sont beaucoup plus vastes dans l'UE que la simple suppression des droits de douane prévue dans les accords régionaux habituels. Le traitement des normes est particulièrement révélateur : le principe de reconnaissance mutuelle va bien au-delà de la simple harmonisation de certaines d’entre elles en supprimant le coût du respect et de mise en conformité des normes sur les marchés de destination des pays membres. La juridiction de la Cour de justice de l’Union européenne permet en outre de réduire l'incertitude sur les politiques économiques, commerciales et réglementaires futures, facilitant les décisions d’investissement des exportateurs. D'autres dimensions du marché unique, non directement liées au commerce de marchandises, sont par ailleurs susceptibles de favoriser une intégration commerciale plus poussée. Les quatre libertés garanties par le marché unique – libre circulation des biens, des services, des capitaux et de la main-d'œuvre, se complètent les unes les autres. Par exemple, la libéralisation du commerce des services est susceptible d'accroître le commerce de biens, puisque la vente de services complémentaires augmente la rentabilité des exportateurs de produits manufacturés. En retour, la libre circulation de la main-d'œuvre facilite la prestation de services à l'étranger par la mobilité des employés ou la présence commerciale par l'intermédiaire de filiales, ce qui peut stimuler les exportations de biens ou de services. […]

À titre d'exemple, lorsque les exportateurs français ont un meilleur accès au marché allemand, les consommateurs allemands consomment probablement plus de biens français mais moins de biens américains, de sorte que les politiques commerciales préférentielles favorisent certains échanges et en freinent d’autres.

Selon nos estimations, le fort impact du marché unique sur le commerce des pays membres décrit précédemment aurait permis une hausse permanente du PIB réel de 4,4 % en moyenne.

Source : T. Mayer, V. Vicard et S. Zignago (2018) : «  L’Union européenne : combien a-t-on gagné à la faire (et combien perdrait-on à la défaire) ?, lettre du CEPII n°389, juin

 

Questions :

1. Pourquoi le commerce entre pays membres de l’UE a-t-il autant augmenté ?

2. Comment l’augmentation du commerce peut-elle favoriser la croissance économique ?

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