Le marché du carbone affecte-t-il la performance des entreprises ?

Publié en février 2023, cette note permet d’actualiser le thème « Quelle action publique pour l’environnement ? » dans les programmes de spécialité SES en terminale et les thèmes « La soutenabilité de la croissance et du développement » et « Politiques structurelles et interventions de l'Etat face aux défaillances de marché » en CPGE.

Le titre et la référence de l'article :

Le marché du carbone affecte-t-il la performance des entreprises ?

Melchior vous propose ce décryptage pédagogique de la note de Trésor éco (Direction générale du Trésor) n° 323, Quel effet du marché carbone européen sur la productivité des entreprises ?, signé par Ariane Alla, afin que vous l’exploitiez en classe avec vos élèves.

 

LES + DE L’ARTICLE

  • Un regard croisé : l’évaluation des effets des quotas d’émission sur la performance des entreprises
  • Un aperçu rapide des 4 étapes de la politique européenne de quotas d’émission

RESUME

Le système européen d'échange de quotas d'émission (SEQE), mis en place en 2005, a pour finalité de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) des secteurs les plus émetteurs : centrales électriques, raffineries, métallurgie, chimie, papeteries, etc.  Il concerne également l'aviation intra-européenne. Le SEQE concerne l'ensemble des pays de l'Union européenne (UE), ainsi que l’Islande, le Liechtenstein et la Norvège, soit environ 10 000 installations représentant, en 2021, près de 40 % des émissions à l'échelle de l'UE-27.

Avec la mise en place de ce système, les installations concernées doivent disposer de quotas d’émission correspondant à leurs émissions effectives. Une partie leur est fournie à titre gratuit, le reste doit être acheté sur le marché. Un marché du carbone est ainsi créé pour inciter ces entreprises à décarboner leur processus de production

Ici, la note de Trésor éco s’intéresse à l’impact du SEQE sur la performance des entreprises concernées en rappelant qu’à court terme, le mécanisme de tarification du carbone augmentant les coûts, notamment dans les secteurs à forte intensité en émissions, il conduit à un effet négatif sur les résultats de l’entreprise. Mais sur le moyen et long terme, le SEQE incite les entreprises à modifier les technologies utilisées au profit d’investissements à bas-carbone. C’est cet impact sur les choix d’investissement qui doit entrainer une réduction des émissions de GES.

Ces effets attendus dépendent largement de l’importance du signal-prix. Or, la note rappelle, graphique à l’appui, que la phase de lancement du SEQE a été très peu contraignante en termes de prix des quotas. Sur le moyen et long terme, tant en France, qu’en Italie et en Espagne, la productivité globale des facteurs (PGF) des entreprises manufacturières a été globalement peu affectée par le SEQE mais le bilan est très différencié selon la taille, le niveau de productivité initiale, les conditions financières de l’entreprise, son secteur d’activité et le pays. Les entreprises les plus modernes, les plus proches de la frontière technologique et finalement les moins contraintes financièrement, ont pu investir plus facilement dans la décarbonation et leur productivité n’est donc pas affectée.

Les effets sont hétérogènes sur le plan économique. Si le chiffre d'affaires et la valeur ajoutée des entreprises couvertes progressent, en revanche, l'emploi est affecté. Plusieurs hypothèses peuvent être envisagées selon Trésor éco : un effet de sélection et une sortie du marché des entreprises les moins performantes, une répercussion des coûts marginaux inhérents au prix du carbone en aval de la chaîne de valeur (clients), ce qui expliquerait l’augmentation du chiffre d'affaires.

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LES TERMES CLES

  • Frontière technologique 

La frontière technologique est définie comme la moyenne de la PGF des 5 % des entreprises les plus performantes.

  • Productivité globale des facteurs

La PGF est la part de la croissance économique qui n'est pas expliquée par l'augmentation des facteurs de production, c’est-à-dire du volume du capital et du volume du travail. Elle traduit l'efficacité de la combinaison productive.

Lien Melchior : la notion de bien commun

LE POINT THEORIQUE

  • Le théorème de Coase et la mise en place de quotas d’émissions

Depuis Arthur Cecil Pigou, la tradition néoclassique considère que, dans le cas d’une défaillance de marché, la mission de l’État est d’influer sur les comportements des agents économiques de manière à obtenir l’optimum du modèle de concurrence parfaite.

Or, dans son article, The problem of social cost, publié en 1960, Ronald H. Coase, prix Nobel d’économie en 1991, montre que cette intervention étatique, notamment par le jeu de taxes n’est pas nécessaire.  En effet, en l’absence de coûts de transaction, la négociation permettrait d’atteindre l’optimum de marché et d’aboutir à un système gagnant-gagnant. Cette analyse a été nommée le « théorème de Coase » par George Stigler en 1966.

En s’appuyant sur des exemples empiriques, Coase pose l’idée que l’échange ne porte pas tant sur un bien que sur le droit d’utiliser ce bien, c’est-à-dire sur les droits de propriété, et que cette utilisation provoque parfois des effets externes. « Le problème du coût collectif » porte selon Coase sur les droits d’accès à certains comportements (polluer par exemple) et une allocation optimale des ressources peut être atteinte grâce à un mécanisme des prix, même en présence d’externalités négatives.

L’État ne doit donc intervenir que pour attribuer initialement les droits et l’allocation optimale se produira par la négociation directe. Coase remet ainsi en cause le caractère automatique de la nécessité de l’intervention de l’État en présence de défaillances de marché, au bénéfice d’une analyse pragmatique, au cas par cas, des bénéfices et des coûts qu’elle engendre. L’arbitrage de l’accès à la ressource rare sera réalisé par les agents eux-mêmes grâce au recours au marché, résolvant ainsi le problème posé par les coûts sociaux engendrés par la pollution. Le SEQE est fondé sur ce type d’analyse.

L’EXTRAIT POUR LA CLASSE DE TERMINALE

Le graphique permet de repérer l’évolution du prix des quotas d’émission depuis la mise en place du SEQE dans l’UE.

Il relie le prix aux quatre phases de fonctionnement du SEQE :

1. 2005- 2007 : attribution des quotas à titre gratuit et fixation d’un plafond d’émissions de GES

2. 2008-2012 : attribution des quotas à titre gratuit et réduction totale de 6,5 % du quota global d’émissions

3. 2013-2020 : mise aux enchères des quotas et remplacement des plafonds nationaux par un plafond unique européen 3 et réduction annuelle du plafond à un taux de 1,74 % ;

4. 2021-2030 : révision du taux à 2,2 %, attribution des quotas par défaut et extension de champ d’application du SEQE.

LES SUJETS QUI FONT DEBAT

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