Entreprendre : la passion d'accomplir ensemble

Isabelle Danjou

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L'auteur

Isabelle Danjou est directrice de recherche au Centre de Développement des Entreprises et de l'Entrepreneuriat (CDEE), laboratoire de recherche de l'Ecole Supérieure de Commerce de Lille.
    
La mode est à la création d'entreprise. A cela, semble-t-il, une explication négative et une explication positive. Les politiques macro-économiques sont, en France, toujours actives, puisque le déficit budgétaire ne descend pas en deçà des 3% du PIB et les sommes consacrées à la politique de l'emploi ne diminuent pas. Le chômage, quant à lui, ne décroche pas. Pourquoi ne pas essayer la création d'activités nouvelles ? Une explication positive : l'insolente croissance nord-américaine est directement liée aux performances d'entreprise qui n'ont pas 25 ans d'âge ! Mais pour que fourmillent les initiatives individuelles, encore faut-il que le personnage de l'entrepreneur bénéficie d'une reconnaissance sociale. Or, la situation française paraît bien ambivalente : observé avec distance et circonspection lorsqu'il se lance dans les affaires, l'entrepreneur est soupçonné d'avoir frôlé les règles du jeu lorsqu'il réussit. Et sa motivation, qui était celle d'un grand projet humain, est bientôt rabaissée à la vile quête du profit. Trois ouvrages permettent de cerner ce grand écart perpétuel duquel seront absents, de toutes façons, ceux qui auront tenté leur chance sans réussir.

Isabelle Danjou s'intéresse à l'entrepreneur, non pas tant à celui qui a lancé l'idée ou présidé à la fondation de l'entreprise, mais au "créateur persistant", celui qui, par son dynamisme, la renouvelle année après année. Elle en brosse le portrait : un homme ou une femme d'action, qui dessine les projets d'avenir et engage l'aventure collective. Et elle détaille les attitudes qui font d'un Monsieur tout le monde un créateur d'entreprise : une conviction qui donne sens, une détermination à concrétiser, une volonté de pérenniser, un défi au cœur de soi, un regard tourné vers l'action, une créativité appliquée et partagée, etc.

L'esprit d'entreprise

Le créateur persistant n'est pas un surhomme, bien au contraire. Et le charme du livre réside dans les témoignages que l'auteur a rassemblés. Ce sont des extraits de récits de vie qui aident le lecteur à toucher du doigt ce qui fait la vie d'un entrepreneur : la décision de tenter la chance et ses déclinaisons qui, au quotidien, la font tourner en sa faveur. C'est que tout projet repose sur un coup d'œil, si bien que ce qui est convenu d'appeler "opportunité" est quelque chose d'éminemment subjectif. Isabelle Danjou ne s'y trompe pas : "les opportunités, affirme-t-elle, ne peuvent être qualifiées de telles qu'au regard de ce qu'elles peuvent représenter pour quelqu'un" (p. 219).

Reste à savoir ce qui permet à l'entrepreneur de qualifier comme telle les opportunités, ce qui fait de lui, en fait, un entrepreneur, ce qui, à tout le moins, lui permet d'initier le projet sans lequel il n'y a pas d'entreprise. C'est une faculté de l'intelligence, affirme Israël Kirzner, l 'alertness , terme anglais qu'on peut traduire par vigilance ou mieux encore par perspicacité. Car l'important n'est pas tant la rapidité avec laquelle l'entrepreneur saisit les occasions de profit jusqu'alors négligées par les autres mais la sagacité avec laquelle il perçoit, dans le flot des événements, les circonstances favorables à un échange mutuellement profitable.

Cette perspicacité porte effectivement sur une matière des plus subjectives. C'est un peu plus qu'une affaire de point de vue, un même panorama se dévoilant rarement en entier d'un même endroit. C'est plutôt une affaire de regard, les différents passants ne reconnaissant pas dans un même panorama tous les chemins qui s'offrent à eux. Tout homme d'action, qui bâtit des plans et mène ses projets, fait preuve d'une telle forme d'intelligence. L'arbitragiste la porte à son comble : il achète à Paul pour revendre à Pierre et tire profit de l'ignorance où ils se trouvent l'un de l'autre. Israël Kirzner ne pousse pas l'analyse beaucoup plus loin car il est plus économiste que psychologue.

L'important, à ses yeux, pour l'économie réelle, n'est pas l'équilibre qui, dit-on, s'instaure entre acheteur et vendeur quand le prix est tel que tous les échanges possibles mutuellement profitables ont été effectués. Cet équilibre repose sur des conditions utopiques, notamment la transparence. L'important est le bouleversement que les entrepreneurs apportent au marché : leur entregent modifie les échanges dans la mesure où ils satisfont mieux un plus grand nombre de consommateurs et remettent ainsi en cause les profits de leurs prédécesseurs. La concurrence n'est donc pas la structure par l'artifice de laquelle tout le monde serait mis sur un pied d'égalité mais le processus par lequel les entrepreneurs découvrent des occasions d'échange ignorées jusqu'alors. On retrouve ici l'un des grands thèmes de Ludwig von Mises dans l'Action humaine (PUF, 1985).

Tables des matières

  1. L'entrepreneur : une flamme, du talent et le goût du projet collectif

1.1. La passion d'accomplir

1.2. Le sens du projet

1.3. L'habileté à fédérer

  1. L'entrepreneur, produit de la vie et de ses passages à l'acte

2.1. Cette vie qui nous fait entrepreneur

2.2 Ces passages à l'acte qui nous appartiennent

Quatrième de couverture

Qu'est-ce que l'esprit d'entreprise ? Qu'est-ce qui amène à entreprendre ? Sur quelles ressources personnelles, quelles façons de penser et d'agir repose la capacité d'action, le comportement d'un entrepreneur ?

Clair et rigoureux, riche de témoignages vivants, cet ouvrage apporte des éléments de réponse à ces questions en se fondant sur un travail de recherche approfondi, mené sur la base des récits de vie de 51 dirigeants d'entreprise et étayé par les apports de disciplines diverses (management, philosophie, psychologie...).

L'auteur explore ce qui participe à "construire" un entrepreneur : l'expérience, les mises en situation, l'entourage, la contingence... et les choix singuliers des individus. Il souligne la variété des itinéraires, des modes d'apprentissage et des contextes où s'exprime l'esprit d'entreprise. Et l'analyse menée conduit à mettre en lumière trois types de ressources qui servent le comportement entrepreneurial : des ressources émotives, moteur de l'action, des ressources cognitives qui servent à concevoir l'action et des ressources interactionnelles qui permettent de conduire l'action.

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