EPREUVE COMPOSEE : Exemple de Partie 1 : Première partie : Mobilisation des connaissances (4 points)

Facile

Sujet : Montrez pourquoi malgré le paradoxe de l’action collective, certains individus s’engagent politiquement.

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Le paradoxe de l’action collective (associé à la théorie du « ticket gratuit », free rider, in La logique de l’action collective, 1965, PUF, 1987) énoncé par l’économiste et sociologie américain Mancur Olson repose sur la modélisation suivante : dans un grand nombre de cas et dans un groupe social de grande taille, un acteur devrait s’abstenir de participer à une action collective, car ainsi il maximalise ses propres intérêts, pour deux raisons. D’une part il bénéficie de la redistribution des biens collectifs obtenus par l’action collective des autres acteurs, d’autre part il conserve le privilège de favoriser la poursuite de son propre bonheur privé et évitant les coûts liés à l’engagement (perte de temps, d’argent, stress). Ainsi, on peut observer dans de nombreux pays de faibles taux de syndicalisation alors que les syndicats obtiennent des bénéfices réels pour les salariés.

Nous allons montrer que les travaux sociologiques distinguent deux types de résolution de ce paradoxe, et que par ailleurs les acteurs eux-mêmes sont orientés dans leurs stratégies par la possibilité de rétributions matérielles et symboliques et par le rôle joué par la structuration des opportunités politiques.

 

Une première résolution du paradoxe, tient à l’observation faite par certains sociologues, critiques à l’égard du paradigme utilitariste d’Olson (je n’agis que lorsque c’est utile pour moi), que les ressorts d’un engagement collectif peuvent être fondés sur les émotions et le sentiment d’appartenance. Ainsi, des considérations éthiques, le souci de renforcer la solidarité d’un groupe, le gain de sociabilité ressenti ou le contrôle interne exercé par celui-ci, l’adhésion à des idéologies ou des valeurs collectives peuvent influencer l’engagement des acteurs.

Mais Mancur Olson a lui-même proposé une solution rationnelle et utilitariste au paradoxe. Les oligarchies syndicales ou partisanes exerceraient un pouvoir de coercition en faisant bénéficier des acteurs acceptant de s’engager de biens personnels non redistribuables et liés à une position dans l’organisation : secrétariat d’une section syndicale ou d’un parti, poste électif… Ces organisations distribuent alors des « incitations sélectives » qui récompensent les individus en fonction de leur engagement personnel.

 

Les militants eux-mêmes acceptant de participer à une mobilisation collective peuvent trouver satisfaction de leur engagement sous forme de rétributions matérielles ou symboliques. Ainsi, le fait d’accéder à des postes de direction dans les partis politiques, la haute fonction publique ou les syndicats, permet d’augmenter ses revenus, d’obtenir des avantages matériels, mais aussi des moyens pour agir conformément à ses convictions ou des gratifications symboliques comme l’estime de soi, le prestige, la notoriété, l’accès à des réseaux de pouvoir.

 

L’engagement des militants dans une action collective peut également être stimulé par ce que le sociologue américain Doug McAdam nomme la « structure des opportunités politiques » entendue comme l’environnement politique auquel sont confrontés les actions collectives et mouvements sociaux , qui peut selon la conjoncture exercer une influence positive ou négative sur leur émergence ou leur développement. Face au système politique (régime politique, système stable ou instable d’alliances partisanes, accès libre ou non aux « forces de relais » comme les médias, degré de pluralité d’opinions parmi les élites) et à l’État (capacité à développer des politiques publiques satisfaisant les revendications collectives), les travaux du sociologue François Chazel ont montré que les mouvements sociaux et les individus qui les composent sont poussés à adopter une stratégie de groupe d’intérêt.  Ainsi, l’introduction d’un mode de scrutin proportionnel en France pour des élections nationales serait un signe favorable pour envisager une arrière militante dans un parti comme Europe Écologie Les Verts (EELV) en France et motiver un engagement collectif. Les travaux d’Olivier Fillieul ont également montré que dans certaines périodes, les ressources acquises dans la sphère militante peuvent faire l’objet de reconversion valorisante dans des institutions étatiques ou à des postes d’ « experts », comme par exemple dans les domaines de la lutte contre le Sida, de l’environnement ou de la lutte humanitaire. Il s’agit ici de fortes incitations à l’engagement individuel et collectif.

 

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