Question 1 : Pourquoi les jeunes étudiés par Nicolas Renahy sont « doublement invisible »
Question 2 : Quelles sont les transformations de la société soulignées ici ?
Question 3 : Selon vous, quelle est la principale caractéristique de la socialisation en milieu rural ?
Question 4 : Que nous apporte le concept de « capital d’autochtonie »
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Question 1 : Pourquoi les jeunes étudiés par Nicolas Renahy sont « doublement invisible »
Réponse 1
La grande majorité des jeunes aujourd’hui est scolarisée. En 2017, sur les 7,5 millions de jeunes de 15 à 24 ans, le taux d’activité (rapport entre le nombre d'actifs et l'ensemble de la population correspondante) était de 36,9% et le taux d’emploi (nombre d'individus de la classe ayant un emploi au nombre total d'individus dans la classe) de 28,7%, avec un taux de chômage plus élevé pour les hommes (9,3%) que pour les femmes (7,1%). De plus, plus de la moitié des jeunes ceux qui ont un emploi l’ont en CDD
Pourtant, lorsque l’on parle de « jeune » (15 à 24 ans) on ne pense pas spontanément à ceux qui ont ou recherche un emploi. Première invisibilité.
De plus, le terme de « jeunesse » renvoie davantage à une réalité urbaine que rurale : on pense plus souvent aux jeunes « des quartiers », des « banlieue », des « centre-ville » qu’à ceux de la campagne. Deuxième invisibilité.
Nicolas Renahy, avec une méthode d’investigation originale (le sociologue devient un « enquêteur-ami »), a étudié le quotidien des jeunes dans un village des environs de Dijon. Il offre un portrait inédit d’une jeunesse rurale méconnue.
Il met en exergue une jeunesse occultée comme « ruraux » et comme « ouvriers » (la classe ouvrière demeure associée, dans les esprits, aux régions industrielles).
Notons que les manifestations de « Gilets jaunes », en 2018 et 2019, ont attiré l’attention des médias et des sociologues sur les habitants, jeunes ou vieux, des zones rurales.
Question 2 : Quelles sont les transformations de la société soulignées ici ?
Réponse 2
Nicolas Renahy souligne d’abord les transformations de la sphère productive et plus largement du travail (travail fixe à l’usine, appartenance à la CSP « ouvriers »).
La désindustrialisation et l’augmentation de la part des emplois atypiques (CDD, intérim) limitent la possibilité d’obtenir un emploi à temps plein en contrat à durée indéterminée (CDI) dans le canton voire le département.
Alors que les pères et, dans une moindre mesure, les mères, accédaient à l’emploi dit « typique » (contrat à durée indéterminée à temps plein avec employeur unique), les fils connaîtront l’insécurité de l’emploi (CDD, intérim, temps partiel, etc.).
De plus, le sociologue souligne aussi les transformations démographiques et sociales liées au modèle familial.
Reconnaissance professionnelle, accès à la propriété et famille nombreuse étaient le schéma dans lequel les jeunes ont été socialisés.
L’enchaînement travail-mariage-enfants est remis en cause par ces mutations sociales et économiques d’autant que le chômage renforce la difficulté à devenir indépendants des parents (quitter le domicile, indépendance financière, etc.) donc d’exister en tant qu’adulte.
Rester au village, c’est pour ces jeunes prendre le risque d’une double peine :
- le chômage ou la succession de petits boulots ;
- le célibat ou l’abandon d’un modèle familial dans lequel ils avaient été socialisés.
Question 3 : Selon vous, quelle est la principale caractéristique de la socialisation en milieu rural ?
Réponse 3
La socialisation est marquée par un enracinement mais aussi un isolement géographique et social. Le territoire est aussi un support de l’identité.
Les « gars du coin » partagent les mêmes lieux de socialisation, les mêmes espaces quotidiens (usine, domicile, foot, cafés, etc.). La construction de l’identité masculine se fait via le groupe d’amis, la pratique sportive, l’appartenance politique et le travail.
Le sociologue note la continuité en termes de légitimité et de reconnaissance entre usine, village, canton et terrain de jeux (ici, le club de football).
Question 4 : Que nous apporte le concept de « capital d’autochtonie »
Réponse 4
Le territoire est un support de l’identité. Le sociologue peut alors créer des concepts pour mettre à jour des transformations sociales. Le concept de « capital d’autochtonie » permet de souligner que l’appartenance à un territoire facilite le recrutement dans les usines locales.
Il permet aussi de comprendre qu’il se dévalorise avec la tertiarisation de l’économie.
En économie, le capital est actif qui permet de produire un revenu. La ressource (rare) disponible pour ces jeunes est le seul fait d’être « du coin ». Ils sont des « gars du coin » parce qu’ils partagent la même enfance et qu’ils forment une génération particulière.