Faisons justice, pour commencer, du point de départ de la théorie sur laquelle s’appuie le discours libéral. Les smicards, dit-on, sont les salariés qui ont la productivité (marginale) la plus faible. La raison pour laquelle ces salariés sont au chômage, au moins pour certains d’entre eux, est que le SMIC est supérieur à la productivité (marginale) correspondant au plein-emploi de cette catégorie de travailleurs. Si les entrepreneurs sont rationnels, ils ont arrêté l’embauche des salariés non qualifiés au moment où leur productivité (marginale) tombe en dessous du SMIC. (…)
Si l’on voulait bien faire place un instant à la possibilité d’une limitation des débouchés, la nécessité et l’efficacité d’une institution comme le SMIC se justifierait […] plus facilement. Ce qui deviendrait intelligible, dès lors, est que le SMIC, loin d’être fauteur de chômage, est un dispositif de la plus grande utilité lorsqu’il existe du chômage, lequel s’explique par ailleurs par une insuffisance de la demande effective1. (…)
Le problème n’est pas que ce salaire minimum soit trop élevé par rapport à la productivité marginale des salariés les moins qualifiés. (…) Lorsqu’il existe du chômage, le problème n’est pas de baisser le prix du travail pour en accroître les quantités demandées, il est de déplacer la demande de travail… c’est-à-dire d’augmenter la quantité de travail demandée à chaque prix, en sorte que même au niveau du SMIC, tout le monde trouve du travail. Ce qui implique d’augmenter l’activité économique. Or c’est bien là le point aveugle de la théorie économique contemporaine, dont on peut dire que le rituel préféré, quasi obsessionnel, consiste à célébrer tous les jours que Dieu fait les obsèques du vieux Keynes, un des seuls économistes qui se soit penché sincèrement sur la question de l’insuffisance des débouchés. Mais ceci est une autre histoire.
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Note 1 : Demande effective : demande de biens et services anticipée par les entreprises qui déterminera le niveau de production.
Source : L. Cordonnier, Pas de pitié pour les gueux. Sur les théories économiques du chômage. Raison d’agir, Le Seuil, 2000 (extraits du chapitre « à bas le SMIC »)
Questions :
1. En quoi l’augmentation du SMIC pourrait-elle réduire le chômage ?
2. Quelle est la cause principale du chômage selon J.M. Keynes ?
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Questions :
1. En quoi l’augmentation du SMIC pourrait-elle réduire le chômage ?
Réponse : L’augmentation du SMIC augmente les débouchés des entreprises et donc le niveau de l’emploi, ce qui contribue à la réduction du chômage.
2. Quelle est la cause principale du chômage selon J.M. Keynes ?
Réponse : La cause principale du chômage est donc l’insuffisance de la demande effective, c’est-à-dire de la demande de biens et services anticipés par les chefs d’entreprises.
A l’échelle macroéconomique, le mécanisme économique à l’œuvre est le suivant : hausse de la demande anticipée par les entreprises => hausse du niveau de production => hausse du niveau de l’emploi => réduction du chômage à l’échelle du pays.