Corrigé des épreuves du baccalauréat-Jour 2 : Dissertation

Modéré

Dans quelle mesure les instruments dont disposent les pouvoirs publics pour faire face aux externalités négatives sur l’environnement sont-ils efficaces ?

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Lors des accords de Paris en 2015, la France s’est engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 37% d’ici à 2030. Cependant, force est de constater qu’elle est loin de son objectif. Les instruments dont disposent les pouvoirs publics pour faire face aux externalités sont des moyens pour inciter ou contraindre les agents économiques à réduire leurs émissions. Les externalités négatives sont les conséquences négatives d’un agent économique sur un autre sans qu’ils ne fassent l’objet d’une transaction sur le marché. Quels sont donc les avantages et les inconvénients de ces instruments dans la lutter contre les externalités négatives ? Nous verrons dans un premier temps qu’ils permettent de lutter en partie contre ces dernières puis nous verrons qu’ils comportent chacun des limites.

 

I-Les instruments de politiques climatiques permettent en partie de lutter contre les externalités négatives

A-La règlementation permet de lutter contre les externalités négatives

La règlementation est l’ensemble des mesures juridiques mises en place par les pouvoirs publics pour encadrer les activités économiques et sociales. Il y a trois types de normes : les normes d’émission et de rejet qui visent à empêcher les pollueurs à ne pas déverser plus d’une certaine quantité de polluants dans l’environnement, es normes de procédés qui visent à obliger l’utilisation de technologies spécifiques pour réduire les émissions (biens alimentaires, interdiction de certains pesticides) et enfin les normes de produits qui décrivent les exigences auxquels doivent répondre le produit (voitures). C’est la méthode la plus utilisée car la plus simple à mettre en place et le résultat est garanti car les entreprises sont obligées d’innover pour changer leur méthode de production. Par exemple, les véhicules thermiques seront a priori interdits d’ici à 2030 en Europe. D’ailleurs, les pays qui ont réduit le plus leurs émissions de CO2 sont les pays qui ont mis en place des règlementations dans le domaine climatique. Ainsi, l’Europe a réduit de 26.2% ses émissions entre 1990 et 2018 selon le Ministère de la transition écologique. Au contraire, la Chine les a augmentées de 369.5%. Si les contrôles sont efficaces, cela permettra de faire diminuer la quantité de CO2 émise par le transport des véhicules et donc les externalités négatives produites par les conséquences de la pollution.

 

B-La taxation permet de lutter contre les externalités négatives

Mesure prise par les pouvoirs publics, qui consiste à prélever une redevance sur un produit, ce qui augmente les prix. Les taxes donnent un prix aux atteintes à l’environnement. Elles contribuent à rendre les biens environnementaux payants et non plus gratuits. Les externalités sont ainsi internalisées. Les pouvoirs publics fixent le niveau de la taxe au prix correspondant à la valeur que la société accorde à la protection des ressources. La taxe contribue à augmenter les coûts de production de l’entreprise. L’entreprise va donc réduire sa pollution si le coût marginal de dépollution est inférieur au prix de la taxe. Les exemples de taxes sont multiples : péage urbain à Milan, taxe carbone, TICC (taxe intérieure de consommation sur les houilles, lignites et cokes), taxe sur les transports, l’énergie… Les avantages est que la taxe n’est pas contraignante pour l’entreprise mais incitative. En effet, toutes les entreprises n’ont pas les mêmes couts de dépollution et cela permet de s’adapter à toutes. Celles qui disposent de coûts de dépollution plus faibles vont réduire davantage leur pollution que les autres. Certaines entreprises choisissent de dépolluer, d’autres de payer la taxe, ce qui incite les entreprises à trouver d’autres méthodes de production moins polluantes. Ainsi, grâce à la taxe carbone, la Suède a réduit ses émissions de 23%. La taxe permet également à l’Etat d’avoir des ressources fiscales avec lesquelles il peut investir dans des énergies plus propres. Par exemple, le malus écologique (document 3) ont pour objectif de décourager les ménages et les entreprises d’acheter des véhicules polluants. Les mesures de taxation permettent donc d’internaliser les externalités et donc de les réduire.  

 

C-Les marchés de quotas d’émissions permettent de lutter contre les externalités négatives

Les marchés de quotas d’émissions sont un système dans lequel les pollueurs peuvent échanger des quotas d’émissions alloués par les pouvoirs publics. Les offreurs vendent leurs quotas inutilisés aux demandeurs pour qui l’allocation initiale était insuffisante. Un prix du quota émerge et incite les pollueurs à tenir compte des externalités négatives qu’ils engendrent. C’est R. Coase qui a préconisé l’attribution de droits de propriété sur les biens environnementaux pour inciter à dépolluer. Dans l’UE a été mis en place en 2005 le système communautaire d’échange de quotas d’émission SCEQE, ou permis d’émissions négociables : droits à émettre en quantités limités de polluants qui peuvent être achetés et vendus par les pollueurs. C’est la Commission européenne qui décide de leur nombre. Les avantages sont qu’elles incitent les entreprises à réduire leur pollution tout en prenant en compte les différents couts de dépollution. En effet, celles qui ont un cout de dépollution faible vont davantage dépolluer pour pouvoir vendre leurs permis d’émissions à d’autres entreprises qui ont un cout de dépollution plus élevé. Il permet de prévoir la quantité de GES émise. Ces marchés bénéficient d’une forte acceptabilité.

 

II-Cependant, les instruments de politiques climatiques présentent des limites dans la lutte contre les externalités négatives

A-Les mesures règlementaires contraignent plus qu’elles n’incitent

Les mesures règlementaires présentent plusieurs inconvénients. En effet, elles nécessitent des contrôles et donc la lourdeur administrative est importante. Elles ne disposent pas d’un  caractère incitatif, elles sont contraignantes car elles imposent à tous les agents la même règle et ne concentrent pas les efforts de dépollution aux entreprises pour qui cela revient moins cher de dépolluer. Elles ne s’appliquent que sur les produits neufs (pour les normes de produits). Les mesures règlementaires sont donc insuffisantes à elles seules pour réduire les externalités négatives.

 

B-Les mesures de taxation présentent des limites

Le taux optimal de la taxe est difficile à définir. Il y a également un risque de dumping et de perte de compétitivité des entreprises si les partenaires commerciaux ne sont pas soumis aux mêmes taxes. En effet, la taxe augmente les coûts de production des entreprises. De plus, il y a le problème de l’incidence fiscale (augmentation du prix des produits, pèsent sur les ménages au lieu des entreprises) mais aussi des effets récessifs sur les revenus et donc davantage pénalisant pour les bas revenus. En effet, selon un rapport sur l’impact environnemental du budget de l’Etat en 2021, la fiscalité énergétique représentent 4.5% du budget total du 20% des ménages le plus modestes contre 1.25% des 20% des ménages les plus riches. Les taxes énergétiques ont donc plus d’impact sur les plus pauvres alors que ce sont eux qui génèrent le moins d’externalités négatives sur l’environnement (car ils consomment moins). Enfin, les entreprises ont une faible acceptabilité de la taxe (ex : écotaxe sur les poids lourds en 2014). Les mesures de taxation comportent donc plusieurs limites qui ne permettent pas de réduire suffisamment les émissions de CO2 et leurs externalités négatives.

 

C-Le marché de quota d’émission n’a pas permis de réduire les externalités négatives

Tout d’abord, cet outil n’est pas adapté aux petites entreprises car les coûts de transaction sur le marché sont élevés, de plus, le système dans l’UE a été un échec. En effet, trop de permis ont été alloué, et certaines entreprises ont bénéficié d’un effet d’aubaine (Arcelor Mittal, cela leur a permis de gagner des millions d’euros). Aujourd’hui, le prix du carbone sur les marchés de quotas sont globalement plus faibles que la taxe carbone et donc sont moins incitatifs et moins efficaces. Le prix du carbone est volatile et cela n’envoie pas des incitations claires aux entreprises qui ont besoin de constance pour réaliser les investissements adéquats. Par exemple, le prix de la tonne de CO2 en Europe pour l’industrie est passé successivement de 23 euros en 2008 puis 4 euros en 2013 pour finalement remonter à 25 euros selon l’Observatoire climat-énergie. Les marchés de quotas ne seraient donc pas complètement efficaces pour réduire la pollution et les externalités négatives qu’elle génère.

Ainsi, les instruments climatiques permettent, quand ils sont bien utilisés, de réduire les externalités négatives sur l’environnement. Chaque instrument, que ce soit la taxe, la règlementation ou le marché de quota a des avantages qui lui sont propres. Il est donc intéressant de les utiliser de manière conjointe. Cependant, chacun de ces instruments comportent des limites. Ils n’ont donc pas permis à la France par exemple d’atteindre les objectifs fixés par l’accord de Paris. Si ces instruments ne sont pas complètement efficaces pour lutter contre le dérèglement climatique, faut-il alors envisager une décroissance de notre production ?

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