Les raison et les risques de la crise catalane

Introduction

A la suite du référendum organisé par les indépendantistes catalans le 01 octobre 2017, la crise entre l’Espagne et la Catalogne s’accentue, prenant désormais une tournure inquiétante. Il est vrai que cette crise n’est pas de nature conjoncturelle. En effet, tout au long de l’histoire, le sentiment indépendantiste a toujours été très fort en Catalogne, qui se distingue d’ailleurs par une langue et une culture politique différentes. Ce sentiment est exacerbé aujourd’hui par des raisons économiques. Les autorités catalanes estiment verser à l’Etat central beaucoup plus qu’elles ne touchent en retour, chiffrant le déficit à 16 milliards d’euros. Même si ce chiffre est contestable, puisque Madrid le situe à 10 milliards d’euros, soit 5% du PIB de la Catalogne, le déficit n’en est pas moins une réalité. Quoiqu’il en soit, la séparation entre la Catalogne et l’Espagne serait un jeu perdant-perdant.

 

I L’indépendance de la Catalogne, un phénomène ancré dans l’histoire

A- Du XVIème siècle aux années 1970

Du XVIème au XVIIIème siècles, l’Espagne est une monarchie devenue indépendante de l’Autriche, dans laquelle la Catalogne constitue un Etat autonome et conserve ses institutions traditionnelles. Même si elle reste à l’écart des affaires du pays, et notamment des échanges avec le Nouveau Monde dont l’essentiel passe par Séville, cela n’empêche pas la Catalogne d’être une région prospère, ce qui explique que les souverains espagnols font appel à elle pour financer la guerre de trente ans contre la France. En 1640, les Catalans rejettent la domination de la Castille et mènent leur guerre de sécession, La Guerra dels Segadors, au cours de laquelle ils se proclament République indépendante sous protectorat français, République reconnue alors par la monarchie espagnole. Un peu plus d’un siècle plus tard, au tout début du XVIIIème siècle, les Bourbons accèdent au trône d’Espagne avec Philippe V (1700-1746), petit-fils de Louis XIV, qui prend Barcelone le 11 septembre 1714. Cette date marque depuis la fête nationale catalane, la « Diada », qui symbolise pour le peuple catalan le début de son « martyre », puisque le roi Philippe V décide d’appliquer à son pays le centralisme à la française, ce qui implique d’y supprimer tous les particularismes.

Au cours du XIXème siècle, la province catalane se modernise au rythme de la révolution industrielle, et la Catalogne devient progressivement la grande région industrielle de l’Espagne. Naît alors un mouvement ouvrier qui se limitera longtemps au pays catalan. Au début du XXème siècle, la région est agitée par le mécontentement des masses populaires urbaines qui veulent améliorer leurs conditions de vie. C’est à la suite de ce mouvement, et de la répression policière de la monarchie espagnole, que la République est proclamée dans les grandes villes d’Espagne, ce qui débouche en 1932 sous la Seconde République par le vote d’un statut d’autonomie pour la Catalogne par le parlement espagnol, au terme duquel le castillan et le catalan, sont placés à égalité comme langues officielles, et à l’issue duquel est proclamée la République catalane en 1934.

Cependant, la guerre civile qui éclate en 1937, suite à la victoire en France du Front populaire en 1936, se solde par la défaite républicaine et la victoire du général nationaliste Franco en janvier 1939. A partir de février 1939 commence l’exode des réfugiés espagnols de la guerre civile (la « Retirada ») au cours duquel 450000 républicains franchiront la frontière franco-espagnole. C’en sera alors fini de l’autonomie catalane jusqu’à la mort du général Franco en 1975. Les mouvements indépendantistes nés dans les années 1920 et 1930 sont interdits et poursuivis, le Castillan devient la seule langue obligatoire, et on ne parle plus la langue catalane qu’en privé. Pour les Catalans d’alors, un des rares moyens d’affirmer leur identité en d’encourager leur équipé de football, le FC Barcelone, et cela explique largement aujourd’hui pourquoi le Barça et ses joueurs sont régulièrement sollicités dans la crise contemporaine.

B- Des années 1970 à nos jours

Après la mort de Franco, le 20 novembre 1975, l’Espagne passe en quelques mois du côté de la démocratie : c’est la « transition démocratique ». A partir de là, l’indépendance de la Catalogne est de nouveau d’actualité. Dès 1977, le gouvernement régional de la Catalogne est rétabli, avec à sa tête le président catalan en exil. En 1978, l’Espagne devient un pays semi-fédéral composé de 17 communautés autonomes, dont 3 d’entre elles reçoivent un statut particulier : le Pays basque, la Galice et la Catalogne. En ce qui concerne cette dernière, la nouvelle constitution espagnole rétablit la Generalitat de Catalanya, province catalane dotée d’une large autonomie, d’un parlement et d’un gouvernement dont le chef a le titre de président. La langue catalane retrouve aussi toute sa place : on assiste à l’essor d’une littérature en langue catalane et à la création de médias locaux. Un an plus tard, en 1979, la Catalogne obtient un nouveau statut d’autonomie régionale : ce statut confère notamment des compétences en matière d’éducation, de santé, de politique linguistique, et permet également de créer une police autonome. Dernière étape significative vers l’autonomie de la Catalogne : en mars 2006, un vote au Parlement espagnol définit la région catalane comme une « nation » : avec ce nouveau statut, les catalans disposent officiellement d’un drapeau national, d’un hymne et de fêtes populaires, autant de symboles nationaux auxquels s’ajoute le fait que l’usage de la langue catalane devient un droit et un devoir sur le sol catalan. Il est à noter cependant que ces acquis incontestables n’empêchent pas dès l’époque l’émergence d’un mouvement en faveur de l’indépendance totale de la Catalogne.

Tout cela est remis en cause quelques années plus tard. En 2010, le parti populaire de Marino Rajoy fait annuler partiellement le statut catalan, avec le rejet de la valeur juridique de la définition de la Catalogne comme « nation », et de l’usage du catalan comme langue préférentielle dans l’administration et les médias, par le Tribunal constitutionnel espagnol. Les catalans répondent par des manifestations, dont le point culminant est le 11 septembre 2012, à l’occasion de la « Diada », pour réclamer un référendum d’indépendance et une négociation du pacte fiscal. L’idée est que l’indépendance débouche sur la création d’un nouvel Etat européen. En 2014, la Catalogne organise un premier référendum d’indépendance, consultation déclarée aussitôt inconstitutionnelle par l’Etat espagnol. Dans la foulée, les partis indépendantistes deviennent pour la première fois majoritaires au Parlement régional le 27 septembre 2015, et le 09 novembre, le Parlement catalan lance le processus de création d’un « Etat catalan » devant aboutir à la naissance d’une « République indépendante de Catalogne ». Enfin, le 9 janvier 2017, Carles Puygdemont, indépendantiste de longue date devenu Président de région en 2016 annonce la tenue d’un référendum le 01 octobre, scrutin que Madrid s’empresse de déclarer inconstitutionnel et illégal, ce qui n’empêche pas le Parlement catalan, malgré les amendes infligées par la Cour constitutionnelle espagnole aux 24 organisateurs du référendum, d’organiser le vote.

 

II- Les aspects économiques de la crise catalane

A- Une région prospère

Grande comme la Belgique, la Catalogne fait partie avec Madrid des deux régions les plus riches d’Espagne. Ce territoire, bordé par la Méditerranée et les Pyrénées, représente 6,3% de la superficie de l’Espagne, 16% de la population et 19% du PIB, et 30% de ses exportations. En termes de PIB/habitant, la région catalane se classe quatrième du pays (28600 euros contre 24000 en moyenne en Espagne), derrière Madrid, le Pays Basque et la Navarre. Au deuxième trimestre 2017, le taux de chômage est de 13,2%, similaire à celui de Madrid (13,0%), mais bien moindre que dans l’ensemble du pays (17,2%).

La Catalogne est la première région exportatrice d’Espagne, s’appuyant sur quelques secteurs économiques moteurs.

L’agriculture est le premier secteur de la région, tiré par l’industrie de la viande, grande exportatrice de porc. Un deuxième point fort est l’industrie chimique, puisque la Catalogne concentre la moitié de toute la production chimique d’Espagne, avec une activité supérieure à celle de nombreux pays européens. La Catalogne est aussi la deuxième d’Espagne en matière d’industrie automobile, Nissan et Volkswagen (via sa marque Seat) y possédant des usines de production, avec 19% de la production nationale, chiffre important quand on sait que l’Espagne est le deuxième constructeur automobile de l’Union européenne derrière l’Allemagne. Un autre atout important de la Catalogne est le secteur de la recherche et des nouvelles technologies. La Catalogne mise sur les biosciences (génétique, neurosciences, biologie cellulaire), secteur qui représente déjà 7% du PIB, ceci étant lié au fait qu’elle est particulièrement riche en hôpitaux de pointe et centres de recherches. Le secteur des services n’est pas en reste puisque la Catalogne, avec sa capitale Barcelone et les plages de la Costa Brava, est la première région touristique d’Espagne. Plus de 18 millions de touristes s’y sont rendus en 2016, soit un quart du total des étrangers accueillis dans le pays. L’aéroport de Barcelone est par ailleurs le deuxième de l’Espagne, derrière celui de Madrid. Il a accueilli en 2016 44 millions de passagers. Quant au port de Barcelone, c’est le troisième port d’Espagne pour les marchandises après Algesiras et Valence, et l’un des plus importants d’Europe pour les croisières touristiques.

S’il y a un point faible de l’économie catalane, c’est celui de la dette publique. Elle représente 35,4% de son PIB, ce qui en fait la troisième région la plus endettée d’Espagne, au deuxième trimestre 2017. En valeur absolue, la Catalogne est même la région la plus endettée, avec une dette de 76,7 milliards d’euros en fin juin 2017. Non seulement cette dette est élevée pour une région d’Europe, mais elle est même classée dans la catégorie spéculative, ce qui l’empêche de se financer directement sur les marchés. De ce fait, la Catalogne est très dépendante des prêts accordés par l’Etat central.

En dépit de ce point faible, le dynamisme de la région est indéniable. Il se manifeste par le fait que la Catalogne a attiré en 2015 environ 14% des investissements directs à l’étranger en Espagne, en deuxième position derrière Madrid, mais très loin devant toutes les autres régions d’Espagne. Il se manifeste aussi par le fait que jusqu’à présent (c’est là un des points d’inquiétude sur les conséquences possibles du mouvement indépendantiste), plusieurs grandes entreprises ont leur siège à Barcelone : le groupe textile Mango, la banque espagnole Caixabank, le gazier Gas Natural, le groupe autoroutier Albertis (propriétaire notamment des autoroutes françaises Sanef) ou le parfumeur Paig (Nina Ricci, Paco Rabanne, Jean-Paul Gaultier). Ce dynamisme est un des arguments forts des partisans de l’indépendance qui pensent que la Catalogne peut rivaliser avec des pays comme le Danemark ou la Bulgarie en termes de poids démographique, ou de la France ou encore de l’Italie en termes de PIB/habitant.

B- L’évaluation de l’impact économique de l’indépendance

Il est difficile d’évaluer avec précision les conséquences économiques de l’indépendance de la Catalogne, parce-que le débat entre les partisans et les adversaires de l’indépendance repose sur des hypothèses et des méthodes différentes.

Du côté des partisans, on pense que le nouvel Etat catalan est parfaitement viable, et cela en raison de la vitalité économique de la région évoquée plus haut. Si les différents acteurs sont unanimes pour dire qu’une déclaration d’indépendance non négociée avec Madrid serait catastrophique pour la Catalogne, puisqu’elle conduirait à une sortie de l’Union européenne plongeant l’ensemble de la région dans une période d’incertitude qui serait très négative pour le secteur privé, certains économistes estiment qu’un nouvel Etat maintenu dans l’Union européenne verrait son PIB rester stable à court terme, avec même des perspectives d’augmentation à un peu plus long terme. Par ailleurs, selon les mêmes économistes, La Catalogne ne devrait plus souffrir de déficit budgétaire, étant donné qu’elle verse actuellement plus d’argent à l’Etat central qu’elle n’en récupère. Sur les aspects régaliens, les indépendantistes mettent en relief le fait que la Catalogne, si elle n’a pas d’armée, dispose déjà depuis 1983 de sa propre police, les Mossos d’Esquadra, qui comporte 17000 agents. En cas d’indépendance, cette police est prête à assumer tous les aspects de la sécurité intérieure. Pour le moment, la police nationale est encore chargée de la lutte contre le terrorisme, du contrôle des frontières et de la lutte contre l’immigration illégale, le reste relevant des compétences catalanes. Quant à la santé et à l’éducation, elles sont déjà gérées par les régions espagnoles, ce qui rendrait d’après les indépendantistes le transfert total de compétences indolore. D’ailleurs, dans ses lois votées au parlement catalan, la région a posé les bases d’une sécurité sociale catalane, même si de nombreux économistes doutent de la viabilité de celle-ci.

Du côté des anti-indépendantistes, on fait d’abord remarquer que le « Catalexit » risque fort de dégrader la demande, qu’il s’agisse de la consommation, des investissements, ou encore des exportations, et donc d’entraîner l’économie dans la récession. L’incertitude économique devrait se solder par une baisse de la consommation. Selon un sondage récent organisé par Metrocopia, 62% des catalans interrogés se disent inquiets pour l’avenir de la région, et si les ménages modèrent leur consommation, cela ne peut que nuire à la demande privée. Outre le repli de la consommation, on peut s’attendre à une baisse encore plus forte des investissements des entreprises, et tout particulièrement ceux en provenance de l’étranger. Déjà en 2015, quand les indépendantistes ont remporté le parlement catalan, Volkswagen-Audi Espagne et quelques grandes banques avaient menacé de quitter la région. Les investissements directs à l’étranger, réalisés à 80% par des entités européennes, seraient particulièrement impactés. Enfin, concernant les exportations, l’indépendance de la Catalogne entraînerait de facto une sortie de l’Union européenne et de la zone euro, et donc l’application du tarif extérieur commun à ses produits. Une telle mesure ne pourrait que diminuer fortement ses exportations vers les autres pays européens, quand on sait que 60% des exportations de la Catalogne sont tournées vers l’Europe.

Le risque financier est également très important. En effet, il faut bien voir que le système bancaire catalan est structurellement fragile. Selon Eric Dor, directeur des Etudes économiques à l’IESEG School of Management, les banques qui ont leur siège en Catalogne « ont une masse sous gestion qui dépasse largement le PIB ». En cas d’indépendance, elles se retrouveraient dans la situation difficile d’avoir une taille de bilan trop grande par rapport aux recettes fiscales, ce qui pourrait avoir pour conséquence l’incapacité pour l’Etat de garantir les dépôts en cas de crise bancaire (c’est ce que l’on appelle le risque souverain, c’est-à-dire le risque qu’un Etat cesse de respecter ses engagements financiers). La fragilité du secteur bancaire catalan pourrait se trouver très affectée par l’augmentation du poids de la dette publique régionale. En 2017, la dette publique espagnole a atteint 1107 milliards d’euros. Si la Catalogne devait assumer sa dette ainsi que sa quote-part de 20% de la dette publique espagnole, son montant s’élèverait à 134% du PIB, ce qui serait difficile à supporter pour l’économie catalane, d’autant plus que l’on peut anticiper une dégradation de sa note par les agences de notation. L’agence Standard and Poors a déjà mis en garde l’Espagne en faisant remarquer que « les tensions entre le gouvernement central et le gouvernement régional de la Catalogne commencent à peser sur la confiance des entreprises et les investissements. Quant à l’agence Moodys, elle a indiqué dès le 11 septembre 2017 qu’une sécession serait de nature à faire baisser la note de crédit de l’Espagne, et donc aussi celle de la Catalogne.

 

Conclusion

Si la coalition au pouvoir en Catalogne pense que la déclaration d’indépendance est légitime parce qu’elle est la conséquence du référendum d’autodétermination du 01 octobre 2017 qui a rassemblé 2,26 millions de votants (soit 42% des participants dont 90,18% de oui) malgré les mesures dissuasives de Madrid avant le vote et les interventions policières le jour du scrutin, il n’en demeure pas moins que la légitimité de cette déclaration est discutable.

Elle est discutable d’un point de vue juridique parce-que le gouvernement espagnol considère non sans raison qu’elle n’a pas de base légale. En effet, la loi instaurant le référendum a été suspendue par la Cour constitutionnelle car elle viole le principe fondamental de « l’unité indissoluble de la nation espagnole ». Dès lors, l’Etat espagnol a différents moyens pour s’opposer à l’indépendance, dont l’article 155 de la Constitution qui autorise le gouvernement à prendre la direction d’une communauté autonome si ses dirigeants « portent gravement atteinte aux intérêts de l’Espagne », la loi de sécurité nationale qui permet au chef du gouvernement espagnol de prendre le contrôle des forces de police régionales, une loi permettant au Tribunal constitutionnel de suspendre les administrations ou fonctionnaires régionaux si ceux-ci ne respectent pas ses décisions, sans compter le soutien des partis constitutionnalistes qui rejettent l’indépendance catalane et l’intervention du roi d’Espagne qui apporte son soutien aux « pouvoirs légitimes de l’Etat pour assurer l’ordre constitutionnel ».

Elle est discutable aussi du point de vue de l’expression démocratique puisque des centaines de milliers d’espagnols hostiles à l’indépendance de la Catalogne se sont exprimés dans les rues de Barcelone le dimanche 08 octobre 2017, après le référendum contesté d’autodétermination. Ce rassemblement était soutenu par le parti conservateur de Mariano Rajoy, mais aussi par le parti socialiste catalan, principale force d’opposition aux indépendantistes en Catalogne.

Au-delà de cette crise politique, il importe de bien voir que l’Union européenne ne veut pas superviser une médiation entre Madrid et Barcelone, car elle considère cette affaire comme un dossier interne à l’Espagne. La plupart des dirigeants européens n’ont pas fait de déclaration sur le référendum, et le Président Macron a confirmé que Mr Rajoy était le seul interlocuteur de la France. Il est vrai que le dossier est très sensible puisque d’autres pays membres, comme le Royaume Uni avec l’Ecosse ou la Belgique avec la Flandre, sont aussi confrontés aux velléités indépendantistes de certaines régions. Dans ces conditions, il est évident que la Catalogne indépendante ne pourrait pas, ou très difficilement, rester dans l’Union européenne et qu’à partir de là, comme on l’a vu plus haut, le risque serait très élevé pour l’ensemble de l’économie catalane.

C’est la raison pour laquelle il faut souhaiter une sortie de crise négociée dans laquelle la Catalogne préserve à la fois son appartenance à l’Union européenne et un statut d’autonomie relative vis-à-vis de l’Espagne dont les contours restent à définir.

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